Le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, devrait se rendre en Iran le 13 novembre pour des consultations avec des responsables iraniens, selon les médias officiels iraniens du 10 novembre. La visite de Grossi intervient alors que les discussions se poursuivent concernant le programme nucléaire controversé de l'Iran. programme et sa conformité aux accords internationaux.
Le chef de l'AIEA avait évoqué la possibilité de se rendre en Iran ces dernières semaines, notamment pour répondre aux préoccupations concernant les activités nucléaires de Téhéran. Grossi devrait engager des discussions avec des responsables iraniens pour explorer les voies permettant de résoudre les différends de longue date entre l’Iran, l’AIEA et l’Occident. L'un des principaux points de discorde a été le refus de l'Iran d'admettre des experts en enrichissement d'uranium dans les équipes d'inspection de l'AIEA, ainsi que son incapacité à fournir des explications claires sur les traces d'uranium trouvées sur des sites non déclarés.
Depuis 2019, l’Iran a de plus en plus intensifié son activité nucléaire, en particulier après que les États-Unis, sous l’ancien président Donald Trump, se soient retirés du Plan d’action global commun (JCPOA) de 2015 – l’accord nucléaire que l’Iran avait conclu avec les puissances mondiales. En réponse au retrait américain et au rétablissement de sanctions sévères, l'Iran a repris certaines de ses activités d'enrichissement nucléaire, suscitant des inquiétudes quant au fait que le pays travaille au développement d'armes nucléaires.
Tensions entre l'Iran et les États-Unis
Les prochains pourparlers entre Grossi et les responsables iraniens surviennent à un moment de tensions géopolitiques accrues, notamment entre l’Iran et les États-Unis. Le 9 novembre, le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araqchi a rejeté les accusations américaines liant Téhéran à un prétendu complot visant à assassiner Donald Trump, qui avaient été signalées par les agences de renseignement américaines. Araqchi a qualifié ces allégations de « scénario fabriqué » et a critiqué les États-Unis pour avoir créé une « comédie de troisième ordre ». Le complot présumé, prétendument orchestré par le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI), a été rejeté par Téhéran comme étant sans fondement.
Les remarques d'Araqchi faisaient partie d'un effort diplomatique plus large visant à apaiser les tensions entre les deux pays, le gouvernement iranien appelant à des mesures de confiance. Cela fait suite à des informations récentes selon lesquelles les services de renseignement américains auraient impliqué l’Iran dans une tentative d’assassinat du président élu américain. L’Iran a nié à plusieurs reprises ces accusations et a appelé à une réévaluation de la politique américaine à l’égard de Téhéran sous la nouvelle administration Biden, en particulier de la stratégie de « pression maximale » poursuivie par l’administration Trump.
La position géopolitique changeante de l’Iran
Dans le même temps, les responsables iraniens se sont montrés disposés à renouer le dialogue avec les États-Unis. Mohammad Javad Zarif, vice-président iranien chargé des affaires stratégiques, a exhorté le président élu Trump à reconsidérer la stratégie de « pression maximale » qui visait à isoler l'Iran économiquement et diplomatiquement. Zarif a souligné l’importance de l’engagement diplomatique et a suggéré que Trump reconsidère les politiques passées, qui, selon lui, se sont révélées contre-productives.
Les commentaires de Zarif s'inscrivent dans le cadre des efforts diplomatiques plus larges de l'Iran, cherchant à résoudre à la fois son programme nucléaire et ses relations tendues avec l'Occident. L’Iran a également exprimé son désir de revenir à l’accord nucléaire de 2015, à condition que les sanctions soient levées et que les termes soient renégociés. Cependant, la situation reste complexe, les deux parties restant méfiantes quant aux intentions de chacun.
L’Iran et le détroit d’Ormuz : une bombe à retardement géopolitique ?
Une autre zone de préoccupation majeure dans la région est le détroit d’Ormuz, un point d’étranglement critique par lequel passe environ 20 % de la consommation mondiale de pétrole. À la suite des tensions croissantes entre Israël et l’Iran, les analystes ont recommencé à spéculer sur la possibilité que l’Iran bloque cette voie de navigation vitale, une décision qui pourrait avoir des conséquences importantes sur les marchés pétroliers mondiaux.
Bien que l’Iran ait menacé à plusieurs reprises de fermer le détroit d’Ormuz dans le passé, les experts considèrent qu’une telle décision est peu probable. Un blocus perturberait non seulement les exportations de pétrole iranien, mais affecterait également d’autres grands exportateurs de pétrole de la région, notamment l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis (EAU). L'impact sur les marchés pétroliers mondiaux serait grave, entraînant une flambée des prix du pétrole, d'autant plus que la Chine, le plus grand importateur mondial de pétrole, dépend fortement du pétrole transitant par le détroit.
Malgré ces menaces, les analystes estiment que la probabilité d’un blocus total reste faible. La présence importante de l’armée américaine dans le golfe Persique, y compris la Cinquième Flotte basée à Bahreïn, constitue un contrepoids aux efforts iraniens visant à perturber le trafic maritime. En outre, l’Iran lui-même serait confronté à des conséquences économiques considérables, dans la mesure où une grande partie de son pétrole est exportée vers la Chine via le détroit d’Ormuz, et tout blocus perturberait cette source de revenus vitale.
L’évolution de la stratégie d’exportation de pétrole de l’Iran
Afin d’atténuer l’impact potentiel d’un blocus, l’Iran s’efforce de diversifier ses routes d’exportation de pétrole. L'inauguration en 2021 du pipeline Goreh-Jask, qui relie les champs pétroliers iraniens au golfe d'Oman, a été considérée comme une étape importante dans cette direction. Le terminal de Jask, d'une capacité de 300 000 barils par jour (b/j), permet à l'Iran de contourner le détroit d'Ormuz. Bien que la capacité du pipeline soit actuellement limitée, des images satellite ont montré que l'Iran stockait du pétrole dans les installations de Jask, suggérant un possible changement dans la stratégie d'exportation de pétrole à long terme de Téhéran.
Malgré ces évolutions, les exportations pétrolières iraniennes ont été affectées par les sanctions internationales et les inquiétudes concernant d'éventuelles représailles israéliennes suite aux récentes attaques de missiles iraniens sur des cibles israéliennes. Ces facteurs ont contribué à une baisse des expéditions de pétrole iranien, avec des craintes qu'Israël ne cible les infrastructures énergétiques iraniennes si les tensions continuent de s'intensifier.
Regard vers l’avenir : les défis de la nouvelle administration américaine
Alors que le président élu Donald Trump devrait prendre ses fonctions en janvier 2025, les analystes s’attendent à ce que sa politique à l’égard de l’Iran reflète étroitement celle de son premier mandat, notamment la réimposition de sanctions et la pression sur Téhéran pour qu’il freine ses activités nucléaires.
Cependant, la capacité croissante d'exportation de pétrole de l'Iran, notamment le développement de routes de contournement comme le pipeline Jask, pourrait offrir à Téhéran une certaine résilience économique face aux nouvelles sanctions. Pourtant, le détroit d’Ormuz restant un point d’étranglement mondial clé, toute tentative de l’Iran de perturber le trafic maritime aurait des conséquences considérables sur l’économie mondiale, en particulier sur les marchés de l’énergie.