Depuis l’intervention militaire russe en Syrie en 2015, ses frappes aériennes ont joué un rôle central dans la préservation du régime du président Bachar al-Assad. Le soutien de Moscou, notamment par le biais de frappes aériennes intensives, a joué un rôle déterminant pour empêcher la chute du gouvernement d'Assad pendant les phases critiques de la guerre civile syrienne. Toutefois, cette intervention a eu un coût dévastateur pour les civils syriens, avec des destructions massives et de lourdes pertes.
La campagne aérienne de la Russie en Syrie a été au cœur de sa stratégie régionale, renforçant l’influence de Moscou au Moyen-Orient. Non seulement il a soutenu Assad, mais il a également positionné la Russie comme un contrepoids à l’influence occidentale dans la région, d’autant plus que les États-Unis et les pays européens s’opposaient à la répression brutale des manifestants par Assad. Malgré les affirmations de Moscou selon lesquelles il ne cible que les « terroristes », la réalité sur le terrain est bien plus sombre, avec des milliers de morts civiles et des dégâts considérables aux infrastructures.
La résurgence du conflit, alors que des groupes militants comme Hayat Tahrir al-Sham (HTS) prennent le contrôle de villes clés comme Alep, signale un autre changement potentiel dans la guerre. La Russie et le gouvernement syrien tentent une fois de plus de réprimer une offensive majeure, mais cela a entraîné davantage de victimes civiles et de destructions.
Frappes renouvelées : un modèle de destruction familier
Des informations provenant d’Idlib, bastion des groupes rebelles et militants, révèlent que les frappes aériennes russes continuent de cibler les infrastructures civiles. Le 2 décembre 2024, des frappes russes auraient endommagé des hôpitaux et des établissements de santé de la région. Des vidéos confirmées par les Casques blancs montrent des bâtiments réduits en ruines, des véhicules en feu et des victimes civiles, dressant un sombre tableau du conflit en cours.
Des experts comme Nicole Grajewski du Carnegie Endowment for International Peace affirment que la stratégie militaire de la Russie en Syrie, en particulier dans les zones tenues par les rebelles, a systématiquement ignoré les vies civiles. « La Russie n'a jamais montré une réelle préoccupation particulière à l'égard des pertes civiles », a noté Grajewski, soulignant l'inefficacité du ciblage russe et le manque de distinction entre les zones militaires et civiles.
Une escalade dangereuse en Syrie et au-delà
Alors que la situation en Syrie s’intensifie, plusieurs puissances internationales sont profondément impliquées. Les États-Unis, la Russie, la Turquie et l’Iran ont des intérêts concurrents dans la région, ce qui complique les efforts de paix. Les récents combats du gouvernement syrien, en particulier la perte d'Alep, ont incité les acteurs extérieurs à accroître leur implication.
L’Iran, fidèle allié d’Assad, a envoyé des combattants supplémentaires en Syrie pour soutenir les forces gouvernementales. À leur tour, les Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par les États-Unis, ont profité de la vulnérabilité du gouvernement pour gagner du terrain dans le nord-est. Alors que cette compétition pour le territoire se poursuit, des acteurs mondiaux comme Israël surveillent également la situation de près, craignant que des armes chimiques et autres armes avancées ne tombent entre les mains de groupes hostiles.
Stratégie russe : dégradation des infrastructures civiles
Mark Galeotti, un expert de la politique et de la sécurité russes, a fait valoir que la stratégie militaire russe en Syrie cible souvent les infrastructures civiles. Même s’il ne s’agit pas toujours d’une stratégie délibérée visant à nuire aux civils, cela fait partie d’une tactique plus large visant à affaiblir les forces d’opposition et à démoraliser la population. « La Russie ne cible pas délibérément les civils et ne les évite pas : s'ils gênent une frappe jugée opérationnellement nécessaire, qu'il en soit ainsi », a déclaré Galeotti.
Ce modèle d'attaques « aveugles », qui s'est également manifesté dans les actions de la Russie en Ukraine, reflète la doctrine militaire plus large de Moscou : une volonté d'accepter des pertes civiles si cela sert des objectifs militaires. De telles actions ont suscité de nombreuses critiques internationales mais sont restées largement impunies sur le terrain.
L'impact sur le Moyen-Orient élargi
À mesure que le conflit s’intensifie, on craint qu’il ne déstabilise l’ensemble de la région. Les tensions entre Israël et l’Iran, tous deux fortement impliqués en Syrie, continuent de s’intensifier. Israël a mené de nombreuses frappes aériennes contre les forces soutenues par l’Iran en Syrie, dont le Hezbollah. La présence croissante de milices en Syrie inquiète particulièrement Israël, qui craint que des armes, notamment chimiques, ne tombent entre de mauvaises mains.
L’implication des forces soutenues par l’Iran complique encore davantage le champ de bataille, en particulier avec la présence de combattants kurdes. Les États-Unis soutiennent depuis longtemps les forces kurdes comme les YPG, mais la Turquie les considère comme un groupe terroriste. Cet équilibre délicat entre factions opposées alimente encore davantage l’instabilité en Syrie et dans les régions environnantes.
La crise actuelle en Syrie, exacerbée par l’implication militaire de la Russie et l’effondrement des processus de paix, ne montre aucun signe d’apaisement. Avec des groupes rebelles comme HTS qui gagnent du terrain et des acteurs extérieurs comme l’Iran et les États-Unis qui font avancer leurs programmes, le chemin vers la paix semble lointain. Pendant ce temps, les civils continuent de subir le plus gros de la violence, leurs maisons, leurs hôpitaux et leurs vies étant détruits par les frappes aériennes et les offensives militaires en cours. La communauté internationale reste divisée et on ne sait toujours pas si la diplomatie ou l’action militaire apportera une solution durable.